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Pour un monde meilleur !
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12 novembre 2006

Info gratinée

Pauvres fous qui croyons que l'avoir est dans nos armoires... Belle humanité que la mienne où le quotidien ressemble trop souvent à un film d'horreur. Bien sûr, il n'y a aucun cadavre autour de moi, ni derniers gémissements, ni bourreaux ni vaincus, c'est tout propre dans ma ville. Mais la mondialisation veut que je sache désormais tout ce qui se passe d'un bout à l'autre de la terre, et de préférence les pires exactions, car elles seules me tiennent en haleine. A l'instar de celui qui freine pour mieux voir l'accident et si possible un peu de sang, sans jamais oser se l'avouer, je regarde ma télé sans pouvoir décrocher. Et ce que j'y vois c'est une humanité qui se déchire sur une planète qui se révolte. Tel est le constat. Bien sûr, il y a des hommes et des femmes qui se penchent à son chevet, une minorité agissante qui a bien du travail, mais ce sont ceux qui souffrent ou torturent que l'on s'échine à me montrer. La peur grandit en moi quand je regarde la télé.

Avant on était tranquille. Aucun récepteur pour les évènements à part les tavernes où il faisait bon se réunir pour parler de la vie du village. Bien sûr, les religions causaient déjà le malheur mais personne ne savait ce qui se passait à quelques lieues du hameau. Les peurs ne s'étendaient pas bien loin.

Aux actualités, je vois des morts à la pelle, en veux-tu en voilà, ça meurt dans tous les sens. Jamais je n'aurai cru qu'on pouvait mourir comme ça... Qu'on était si nombreux. On nous montre désormais les cadavres, les caméras sont partout. Et moi, je regarde ces charniers à ciel-ouvert sans pouvoir rien faire, me demandant à chaque seconde quel genre de mort m'est réservée ? A la télé, rares sont ceux qui meurent dans leur lit. Souffrirai-je comme eux ? Quelle sera ma dernière pensée ?

L'actualité sur Yahoo ? " L'Atlantique entre dans sa phase cyclonique la plus intense ; des produits chimiques décelés chez des nouveaux-nés et leurs mères ; les dossiers peu convaincants sur le décès de Yasser Arafat ; la France est confrontée à l'une des quatre ou cinq plus importantes sécheresses depuis 1945 ; la Toile est devenue une arme privilégiée pour Al-Qaïda " ? Qu'y puis-je ? A part grimacer en espérant pouvoir trouver l'oubli le plus vite possible.

Et je prends et je gobe. Ici 200 000 morts, un record en si peu de temps, là on approche du 26 000 000 ème, si je n'envoie pas des sous vite vite. La sinistrose me bouffe, je ne peux rien faire, je suis responsable, mes richesses me rendent coupable. Ailleurs on meurt emprisonné dans la lave, ils étaient trop près, ils n'y croyaient pas, ou dans une maison en feu, le gaz oublié. Un peu partout on empoisonne, sans jamais parvenir à cesser de polluer, l'agonie sera lente mais le toxique fait son effet.

On m'apprend que mon monde va au casse-pipe, que font-ils ? Comment vivre dans un tel contexte ? Qui le pourrait ? L'information est notre enfer. A trop en savoir je ne peux plus rien faire. 

Comme ils étaient bien dans leurs villages.


Par Henri Laborit, La colombe assassinée :

" A l’opposé, l’abondance des informations, si l’on voit qu’il est impossible de les classer suivant un système de jugements de valeur, met également l’individu dans une situation d’inhibition. Il faut reconnaître que notre civilisation contemporaine au sein de laquelle les informations se multiplient grâce aux moyens modernes de communication, les mass media en particulier, et par la vitesse de ces communications à travers le monde, place l’individu dans une situation où le plus souvent il ne peut agir sur son environnement pour le contrôler. Les paysans vendéens de mon enfance qui n’allaient à la ville, pour certains, que trois fois au cours d’une vie, ville pourtant qui n’était située qu’à trente-cinq kilomètres, avaient des sources d’information qui ne leur venaient pratiquement que de leur environnement immédiat. Pas de journaux, pas de télévision, pas de radio. Bien sûr, il existait des événements que l’on pouvait craindre, les mauvaises récoltes, les épidémies. Il n’en demeure pas moins que chaque individu avait l’impression de pouvoir contrôler par son action sa niche environnementale. Ce n’est plus le cas aujourd’hui et quand on diffuse à la télévision les atrocités qui apparaissent à travers le monde, quand on voit un enfant du Biafra en train de mourir de faim, squelettique et couvert de mouches, malgré l’intérêt très limité que peut représenter cet enfant pour un homme bien nourri du monde occidental, cet homme ne peut s’empêcher de se représenter inconsciemment que ce qui est possible pour certains hommes défavorisés pourrait peut-être le devenir aussi un jour pour lui, et il ne peut rien faire. C’est en cela que les préjugés, les lieux communs, les jugements de valeur, le militantisme, les idéologies et les religions ont une valeur thérapeutique certaine car ils fournissent à l’homme désemparé un règlement de manœuvre qui lui évite de réfléchir, classe les informations qui l’atteignent dans un cadre préconçu et mieux encore, lorsque l’information n’entre pas dans ce cadre, elles ne sont pas signifiantes pour lui, en quelque sorte, il ne les entend pas. Il est prêt, en d’autres termes, à sacrifier sa vie pour supprimer son angoisse ou si l’on veut il préfère éprouver la peur, débouchant sur l’action, que l’angoisse. Il est même à noter que la peur ne l’envahit que les courts instants qui précèdent l’action. Dès qu’il agit, il n’a plus peur, et il le sait bien. "

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Commentaires
Pour un monde meilleur !
  • Par chris StJames. Pour les savants, c'est pour dans pas longtemps, ça va péter aussi sûr que deux et deux font quatre, et l'important n'est pas de savoir "si" ça va arriver mais "quand". Que faire du temps qu'il nous reste pour changer l'inéluctable ?
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